L’histoire d’Entre mer et ciel

A toi, qui a été un long voyage de création, j’écris ce texte pour partager ce qui se cache en toi.

J’ai d’abord voulu m’amuser. J’ai pris tout un tas de chutes de tissus et j’ai collé, cousu, assemblé.. 

Et puis je t’ai recouverte de bleus et assez vite, cela t’a donné un air triste de déchets retrouvés en mer. Comme si une pollution remontait et ternissait un paysage de notre enfance.

J’étais embarrassée. Je n’avais pas l’intention de parler déchets et je ne voulais pas être prise par la tristesse. Alors j’ai contré, mis des couleurs vives et chaudes, essayé de faire autre chose. Changer de sujet.
Et ce fut un semblant de joie.

Ce n’était plus « vrai ». Cela ne marcha pas et puis je me perdais. Je ne savais plus quoi faire avec toi.

J’ai repris les bleus, amené des nuances, et le sombre est réapparu. De grandes formes presque noires ressemblaient à des oiseaux couverts de pétrole. Les dégâts insupportables de nos modes de vie dopés. Et face à moi, la mort des êtres qui en subissent les conséquences.

J’ai pensé à toutes ces personnes qui souhaitent rejoindre l’Europe en traversant la Méditerannée et qui souvent ne s’en sortent pas. Il y a bien des raisons de se sentir puissamment triste face à cela.

Alors j’ai décidé de te laisser imprégner ces images douloureuses, parce qu’elles sont des réalités, que j’avais essayé de les nier et qu’à présent je ne voulais plus leur donner ce sort.

J’avais ensuite besoin de te laisser reposer. 

Et nous nous sommes reposés. Des mois.

En te retrouvant, j’ai pris beaucoup de soin. Les bleus profonds m’ont aidé, et c’est comme si j’appliquais petit à petit ces couleurs pour réanimer les corps noyés. C’était beaucoup de tendresse. Une tendresse qui me touche encore. Et une forme de profondeur aussi. Imagine cet instant comme si le temps ralentissait tellement que tu ne peux que sentir ton coeur qui bat. Ou encore un bain où on te nettoie si doucement que le temps s’envole.
Loin. 

Ainsi l’oiseau fut nettoyé.

Peu à peu, un ciel étoilé est apparu. Un ciel que j’ai tout de suite vu en miroir à cette mer pleine d’histoires à honorer. Je ne l’avais pas attendu et j’ai été si émue de ces lumières lointaines qui reflétaient dans cette grande eau salée. Je me suis dit que chaque étoile venait éclairer une âme disparue. Et depuis, quand je regarde le ciel nocturne, j’ai autant d’amour et de peine, mais surtout le rappel des millions de vies à respecter.

« Sur chacun.e de vous, je dépose une étoile. »

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